Le « confinement ». Certainement l’un des mots les plus utilisés ces dernières semaines. Les terminologies; c’est intéressant. Nous entendions au départ parler sans cesse du « Coronavirus »; puis du « Covid 19 ». A présent, il me semble que c’est le terme de « confinement » qui domine. Vous observerez, et me direz peut-être. Alors, qu’en est-il du confinement? De quoi parle-t-on ?
Le confinement a d’abord pour visée première d’aider à enrayer l’épidémie; tout du moins à éviter qu’elle se propage de façon trop massive et rapide afin de soulager les services de soins. Je n’aborderai pas davantage l’aspect médical qui n’appartient pas à ma compétence. Mais à ce stade de l’épreuve que nous traversons tous, après quatre semaines de ce fameux confinement, j’aimerais parler du « confinement psychique », aperçu d’un point de vue psychologique.
Dans le domaine de la santé mentale, le confinement n’est pas une notion totalement nouvelle. Dans certaines pathologies psychiatriques, les patients vivent une sorte de « confinement mental », d’enfermement psychique, où tout se bouscule à l’intérieur de soi, où tout se confond. Il existe parfois certaines phobies et troubles qui empêchent inévitablement de sortir… Tant d’aspects abordés déjà « hors confinement Covid 19 ».
Et puis, aujourd’hui, nous sommes presque tous « logés à la même enseigne », presque je dis bien. Chacun le vit de façon singulière. Certains comme une véritable contrainte ; d’autres comme une situation qui peut même se montrer confortable. Les récits divergent, mais dans quasiment tous les cas, il y a bien une remise en question, si infime soit-elle même chez les plus résistants à l’introspection. L’introspection , ce concept clé que l’on retrouve dans la philosophie, dans la psychologie. Et c’est bien FREUD qui élargit ce principe d’introspection en créant la psychanalyse. L’introspection, ce « regarder à l’intérieur de soi », si précieux, si fastidieux parfois aussi; si riche au contact des patients qui me permettent si souvent d’aller voyager à leurs côtés dans l’intime Soi.
J’avais envie de partager cet écho qu’a pu faire en moi , à un moment donné et au travers du discours des patients, le confinement. Un « confinement utérin », maternel même. Si nous abordons le confinement à travers cette très réussie BD de « Coco et le CoConfinement », où le confinement est joliment expliqué aux enfants comme un « cocon » qui va protéger et permettre de mieux sortir ensuite. Alors, le confinement psychique comme un retour au ventre maternel. Un retour où il est question de se protéger, de se nourrir , de continuer à bien pousser , pour peut-être « grandir »… Avant de naître, le foetus a bel et bien une existence dans le ventre maternel. Il mange, il bouge, il sent et ressent. On sait aujourd’hui que cette vie intra-utérine est déterminante pour la suite et le devenir du bébé. Le foetus se nourrit par le cordon ombilical qui le lie à la mère , mais il se nourrit aussi et déjà de « nourritures affectives » et d’interactions précoces. Interactions qui seront essentielles dès la naissance pour le développement psycho-affectif du petit être. La naissance… Le même FREUD a parlé de la naissance comme du premier traumatisme vécu. Tiens, voici là encore un point commun à tout être humain, ce trauma de la naissance; même si chaque naissance est bien entendu singulière.
Alors, faisons des petits liens simples et modestes aujourd’hui. Abordons un peu ce que nous renvoie le confinement actuel dans notre être le plus profond. Quel écho avec cette vie intra-utérine de laquelle nous venons tous? Et pourquoi pas préparer au mieux cette sortie; sortie tant attendue et revendiquée par tous, et parfois si crainte aussi… La sortie ne pourrait-t-elle pas être vécue comme une « renaissance »? Le grand monsieur Boris Cyrulnik, que j’admire et affectionne tant, parle LUI du concept de Résilience, qu’il a créé, et qui est facilement repris aujourd’hui. Ce terme met en avant cette capacité d’adaptation face à un traumatisme. Boris Cyrulnik s’exprimait récemment sur cette idée que dans l’épreuve actuelle, la résilience apporterait de profonds changements. Ce serait réellement souhaitable, oui.
Dès lors, après avoir réussi à accepter et à s’adapter au mieux, confinons nous comme dans un ventre utérin, construisons nous de nouvelles défenses, protégeons nous ou apprenons à nous prémunir de toutes les sollicitations et de tous les stimuli négatifs et parfois toxiques.
Inscrivons nous dans des introspections pour essayer de comprendre, comme nous le pouvons et avec toute l’indulgence possible, qui nous sommes. Et surtout, préparons nous ainsi à la suite. Cette suite comme une autre naissance, peut-être un nouveau trauma, mais quelque chose qui donnera lieu à du renouveau.
Nous pourrons ensuite réfléchir et travailler sur ce que nous pourrions appeler le « déconfinement psychologique », bien trop souvent mis au second plan… Car il y aura oui, des conséquences psychologiques et affectives. Il faudra aller puiser en soi pour y faire face. En tant que psychologue, je travaille beaucoup sur ce que sera la suite, l’après, et la reconstruction.
A suivre donc , avec toute l’attention et la bienveillance possibles.
MAGALI FURIA PSYCHOLOGUE